Recours Individuel
01 January 0001 Monday
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
26/06/2020
No BB 38/20
Irrecevabilité du grief selon lequel le droit à la liberté et à la sureté de la personne a été enfreint en raison de l’illégalité de la détention du requérant qui était utilisateur de l’application « ByLock »
Le 4 juin 2020, dans l’affaire M. T. (requête no 2018/10424), l’Assemblée plénière de la Cour constitutionnelle a déclaré irrecevable le grief du requérant, selon lequel son droit à la liberté et à la sécurité personnelle avait été enfreint, pour être manifestement mal-fondé. |
En fait
Le requérant fut l’objet d’une détention, puis d’une procédure judiciaire pour être membre de l’Organisation terroriste güleniste/Structure d’État parallèle (« FETÖ/PDY ») dans le cadre d’une instruction conduite par le procureur général au lendemain de la tentative du coup d’État du 15 juillet 2016. À terme de cette procédure qu’il participa en détention provisoire, le requérant fut condamné pour appartenance à une organisation terroriste armée.
Griefs du requérant
Le requérant allègue que son droit à la liberté et à la sureté de la personne a été violé en raison de l’illégalité de la mesure de détention provisoire appliquée.
Appréciation de la Cour
. Le fondement principal de l’accusation et donc de la mesure de la détention provisoire du requérant était la constatation que le requérant était utilisateur de l’application intitulée « ByLock » Il convient mieux, ainsi, d’évaluer, avant tout, l’application en question dans le cadre de l’examen de la légalité de la mesure de détention.
Sur la question de savoir si l’utilisation de l’application « ByLock » constitue ou non une indication forte de l’existence d’un crime en lien avec le FETÖ/PDY, il est nécessaire de prendre en compte la nature et les caractéristiques de la mesure ainsi que la méthode organisationnelle du FETÖ/PDY. En outre, le décryptage effectué par les autorités d’enquête ou judiciaires sur le contenu de la correspondance réalisée par l’intermédiaire de cette application et les faits tirés des dépositions de certains utilisateurs présumés de cette application sont des éléments à ne pas ignorer lors de cette évaluation. Les appréciations de la Cour en ce sens sont les suivantes :
Un grand nombre de décision judiciaire met en avant que le FETÖ/PDY, une organisation qui misait sur la confidentialité, utilisait notamment l’application « ByLock », parmi d’autres, afin de ne pas être dévoilé. Le fait que l’application « ByLock », qui est un programme conçu pour assurer une communication en ligne, est installée, dans la plupart des cas manuellement, par des membres du FETÖ/PDY, sur les téléphones ou appareils électroniques/mobiles des personnes en lien avec l’organisation, démontre bien que l’application fut développée afin de conserver la confidentialité de la correspondance secrète concernant les activités de l’organisation.
Les mesures de sécurité hors du commun instaurées afin assurer la confidentialité du programme « ByLock » prouvent que l’application en question n’a pas été développée pour fournir un service de communication ordinaire. Les constatations obtenues quant au mode d’utilisation du « ByLock » illustrent effectivement que l’application a été développée en vue de contrôler et superviser fermement les correspondances réalisées par un groupe de personne précis à un haut niveau élevé de confidentialité.
Les mesures mises en place à chaque niveau de l’écriture du programme afin d’empêcher l’accès à la correspondance effectuée par son intermédiaire montrent que l’application ne vise pas à satisfaire un besoin de communication ordinaire mais bien plus privée et confidentielle. Les spécificités de l’installation et de l’utilisation de l’application vont dans le même sens que la manière de fonctionnement et le comportement adopté par le FETÖ/PDY lors de la mise en œuvre en toute discrétion de ses activités diverses.
Il en ressort que le mode d’emploi du « ByLock » a été calqué sur le modèle organisationnel du FETÖ/PDY. Il permet une communication intra-organisationnelle sans avoir besoin d’autre moyens de communication. En outre, l’un des traits de comportement principaux des membres du FETÖ/PDY est l’adoption de pseudonyme pour garder leurs identités secrètes. De plus, les éléments issus de la base de données de l’application « ByLock » concernant certains utilisateurs révèlent leurs liens avec le FETÖ/PDY.
Une part importante du contenu décrypté de la correspondance effectuée sur « ByLock » appartient aux membres du FETÖ/PDY dans le cadre de la prise de contact et des activités organisationnelles. Plusieurs personnes ayant fait l’objet d’instruction/de poursuite pour des crimes en lien avec l’organisation FETÖ/PDY, ont soumis des dépositions incluant des explications sur l’application « ByLock ».
Compte tenu de l’ensemble des éléments, la Cour note que les considérations des autorités judiciaires selon lesquelles sous la façade de caractère globale du système de communication « ByLock », se trouve en réalité un programme conçu pour assurer la communication organisationnelle parmi les membres du FETÖ/PDY et qu’ainsi la correspondance intra-organisationnelle avait été effectuée en toute confidentialité par l’intermédiaire de cette application, se fondent sur des éléments factuels solides et des données matérielles/techniques. Dans ces circonstances, l’admission de l’utilisation du « ByLock » comme une activité liée à l’organisation en question, ne peut être considérée comme une approche mal-fondée ou arbitraire.
Par conséquent, considérant dans un ensemble (a) les considérations de la police et des autorités publiques - qui ont également été adoptés par les autorités judiciaires – quant aux questions telles que la création, le mode et la méthode d'emploi et les techniques de cryptage de l’application « ByLock », le caractère des noms d'utilisateurs et de groupes ainsi que le contenu de la correspondance effectuée à travers cette application; (b) le fait que les informations et documents obtenus depuis l'application ainsi que les caractéristiques de celle-ci correspondent presque entièrement à la formation organisationnelle du FETÖ/PDY ; (c) les dépositions de certains utilisateurs authentifiés; (d) l’identification d'autres faits et éléments de preuve mettant à l’évidence la relation entre le FETÖ / PDY et une grande partie des personnes ayant utilisé ladite application, la Cour observe que l’utilisation de l’application « ByLock » ou la simple son installation de celle-ci sur les téléphones ou appareils mobiles des personnes peuvent être considérées comme de fortes indications prouvant l’existence de crime liés au FETÖ/PDY.
Eu égard à ce qui précède, la Cour constitutionnelle déclare irrecevable le grief selon lequel le droit à la liberté et sureté de la personne avait été violé, pour être manifestement mal-fondé.
Préparé par le Secrétariat Général, le présent communiqué de presse vise à informer le public et ne lie pas la Cour constitutionnelle. |