Recours Individuel
01 January 0001 Monday
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
03/07/2020
No BB 41/20
Violation des principes de l’égalité des armes et du contradictoire due à l’absence d’information concernant les informations et documents secrets ayant servis de preuves dans la procédure
Le 3 juin 2020, dans l’affaire Bünyamin Uçar (requête no 2017/32004), la Première Section de la Cour constitutionnelle a déclaré la violation de l’article 36 de la Constitution garantissant le principe de l’égalité des armes et le principe du contradictoire. |
En fait
Le processus de recrutement du requérant fut interrompu en raison du résultat non favorable de son enquête de sécurité, bien qu’il ait réussi le concours de recrutement de personnel. Le recours en annulation introduit par le requérant devant le tribunal administratif (« le tribunal »), puis l’appel formé par celui-ci contre le jugement du tribunal, furent respectivement rejetés.
Griefs de requérant
Le requérant allègue la violation de son droit à un procès équitable du fait de ne pas avoir été informé des informations et documents secrets ayant servis de preuves dans le cadre de la procédure d’annulation.
Appréciation de la Cour
Le requérant intenta une procédure en vue de l’annulation de la décision d’interrompre le processus de recrutement en raison du résultat prétendument non favorable de l’enquête de sécurité conduite dans le cadre du processus de recrutement, malgré qu’il ait réussi les concours de recrutement d’officiers militaires sous contrat et de sous-officiers militaires de carrière.
L’interruption en cause se fondait essentiellement sur le contenu de l’enquête de sécurité. Il était donc crucial pour le requérant d’être en connaissance du contenu en question afin que celui-ci puisse présenter sa défense et ses arguments contre l’enquête de sécurité. Faute de quoi il se serait retrouvé dans une situation affaiblie et désavantageuse face à la décision de l’administration (le Commandement général de la gendarmerie et le Ministère de la défense nationale) d’interrompre le processus de recrutement se fondant sur l’enquête de sécurité, ainsi que face à leurs arguments soumis au dossier de l’affaire.
Il est évident que le requérant a été victime d’une pratique contraire aux principes de l’égalité des armes et du contradictoire. Toutefois, il convient d’examiner si cette pratique a porté atteinte à l’équité de la procédure dans son ensemble afin de savoir s’il constitue une violation dans le cadre du droit à un procès équitable.
En l’espèce, le tribunal a ordonné aux autorités administratives défenderesses de lui transmettre les informations et documents ayant servi de fondement à la décision d’interrompre le processus de recrutement du requérant. Sur ce, les autorités administratives défenderesses soumirent au dossier de l’affaire des informations et documents concernant le requérant avec la mention « classés secrets ». Le tribunal décida finalement de rejeter l’affaire litigieuse en se fondant sur ces documents.
Lors de l’examen des dossiers en question à travers le Système informatique du réseau judiciaire national (« UYAP »), aucunes informations ni documents, démontrant que le requérant avait été informé concernant les documents « classés secrets » soumis au dossier de l’affaire ou qu’il avait eu l’occasion de les examiner, n’ont pu être identifiés.
La Cour observe que les autorités administratives en question n’ont su apporter quelconque motif valable justifiant l’absence d’offrir toute possibilité au requérant d’examiner les documents en question et que ce dernier n’avait pas été informé de ces documents. Par conséquent, la Cour considère que le requérant ne s’était pas vu accorder la possibilité de se défendre contre les documents « classés secrets », soumis par les administrations défenderesses au dossier de l’affaire et fondant la base du jugement du tribunal.
Au vu de ce qui précède, la Cour constitutionnelle conclut que les principes de l’égalité des armes et du contradictoire garantis par l’article 36 de la Constitution n’ont pas été respectés.
Préparé par le Secrétariat Général, le présent communiqué de presse vise à informer le public et ne lie pas la Cour constitutionnelle. |